HABIB BOURGUIBA (1903 – 2000)
Leader de la lutte pour l'indépendance (1932-56), et Fondateur de la Tunisie moderne (1957-1987).
Enfance et études du jeune Bourguiba (1903-1927)
Fils d'un officier de l'armée symbolique que
l'occupant français avait accordée au bey de Tunis, Habib Bourguiba est né
officiellement le 3 août 1903 à Monastir, dans une famille de condition
modeste, mais une forte incertitude demeure sur cette date qui, selon certains
de ses biographes, pourrait avoir été falsifiée de quelques années pour
rajeunir le «combattant suprême».
Après avoir obtenu son certificat d'études primaires à
l'école Sadikienne, il entame ses études secondaires au Collège Sadiki à Tunis
où il décroche le Brevet d'arabe avant de s'inscrire au Lycée Carnot où il obtient,
coup sur coup, la première partie puis la seconde partie du Baccalauréat, en
1924. Il s'embarque ensuite pour Paris (Sorbonne) où il poursuit ses études
supérieures à la Faculté de Droit et à l'Institut d'Etudes Politiques. En 1927,
il y obtient respectivement sa Licence en Droit et le Diplôme supérieur
d'Etudes Politiques.
Il rencontra durant son séjour en France une femme
française, Mathilde, qu'il épousa en 1927. Elle lui donnera son fils Habib qui
deviendra l'un de ses conseillers les plus écoutés.
Le militantisme débutant et la formation du
Néo-Destour (1927-1934)
De retour à Tunis dès l'obtention de ses diplômes en
1927, il exerce sa profession d'avocat, parallèlement à d'autres activités.
Ainsi, il participe à la rédaction de nombreux articles dans les journaux
nationalistes qui paraissaient à l'époque, tels "La Voix du Tunisien"
et "l'Etendard Tunisien". Le 1er novembre 1932, il crée, de concert
avec un groupe de compagnons, le journal "L'Action Tunisienne" qu'il
dirige en personne.
A la suite du Congrès du Parti du Destour, tenu le 12
mai 1933, il devient membre de la Commission Exécutive du Parti. Cependant, le
9 septembre 1933, il en démissionne après avoir fait l'objet de vives
réprimandes pour avoir fait partie d'une délégation de dignitaires de Monastir
qui s'était rendue au Palais du Bey pour protester contre le gouverneur de la
ville qui avait autorisé l'inhumation du fils d'un naturalisé dans le cimetière
musulman.
Il s'emploie, par la suite, à expliquer les raisons de
sa démission de la Commission exécutive, jusqu'à ce qu'il fût décidé de réunir
un congrès extraordinaire du parti, le 2 mars 1934 à Ksar Hellal. Ce congrès se
termine par la dissolution de la Commission exécutive et la constitution d'un
Bureau politique composé comme suit : le Dr Mahmoud Materi, Président; Habib
Bourguiba, Secrétaire Général; Tahar Sfar, Bahri Guiga et M'hammed Bourguiba,
membres, fondant le Néo-Destour.
La répression coloniale (1934-1940)
Au milieu des années 30 et après la nomination de
Marcel Peyrouton comme Résident général de France en Tunisie, la répression
coloniale se fait plus violente dans le pays. Les militants nationalistes font
alors l'objet de mesures d'éloignement dans le Sud tunisien : Le Leader Habib
Bourguiba et certains de ses compagnons sont ainsi assignés à résidence à
Kébili puis à Borj Leboeuf.
La résistance nationale se poursuit, cependant, sous
diverses formes, jusqu'à la remise en liberté des leaders exilés, et cela à la
suite de l'accession du Front populaire au pouvoir en France (le 3 mai 1936),
sous la conduite de Léon Blum. Ils reprirent alors leur combat, le Bureau
politique s'employant activement à concrétiser les revendications patriotiques,
dès lors que le Gouvernement français avait failli à ses engagements. L'atmosphère
devint des plus tendues, vers la fin de 1937, au lendemain du Congrès de la Rue
du Tribunal, qui proclama sa défiance vis-à-vis du Gouvernement français en
raison de ses orientations incompatibles avec les promesses faites.
Alors, le mouvement national eut à faire face à des
événements sanglants qui connurent leur paroxysme le 9 avril 1938 et à la suite
desquels le Leader Habib Bourguiba et ses compagnons furent arrêtés et détenus
à la prison civile, ainsi qu'à la prison militaire où il fit l'objet d'un long
interrogatoire pour conspiration contre la sûreté de l'Etat, avant d'être
transféré à la prison de Téboursouk puis à des prisons en France.
Bourguiba et la guerre (1940-1944)
Le régime de Vichy le livra à Rome en 1940 à la
demande de Mussolini qui espérait l'utiliser pour affaiblir la Résistance en
Afrique du Nord. Cependant Bourguiba ne voulut pas cautionner des régimes
fascistes et lança le 8 août 1942 un appel en faveur du soutien aux troupes
alliées face aux forces de l'Axe. Cette position lui valut d'être aussitôt
arrêté par les Allemands, mais allait être à l'origine de sa remise en liberté,
en avril 1944.
Bourguiba ambassadeur de la cause tunisienne.
(1945-1949)
En 1945 cependant, la position française resta
inchangée et Bourguiba partit s'installer au Caire, où se trouve le siège de la
Ligue des Etats Arabes, en vue de rallier des soutiens à la cause nationaliste
tunisienne. De concert avec Abdelkrim Al Khattabi, il y participe à la
fondation du Bureau du Maghreb Arabe, avant de repartir pour New York, en
décembre 1946, afin de faire connaître la cause de la Tunisie aux Nations
Unies. Dans les années qui suivirent, Bourguiba visita de nombreux pays, où sa
forte personnalité lui valut nombre de victoires diplomatiques.
La lutte sur le terrain et l'exil (1949-1954)
Conscient de l'importance du combat pour la liberté, à
partir de l'intérieur même du pays, il rentre en Tunisie en septembre 1949,
avant de s'embarquer de nouveau pour la France en vue de gagner des
sympathisants au sein de la gauche française et de faire connaître davantage le
mouvement nationaliste tunisien. Il annonce un programme en sept points et,
intéressé par la première expérience de pourparlers, apporte son soutien à la
participation du Leader Salah Ben Youssef au sein du Cabinet Chenik formé en
vue des négociations.
Toutefois, les résultats ne furent pas à la mesure des
attentes des nationalistes puisqu'ils débouchèrent sur le Mémorandum du 15
décembre 1951 imposant la co-souveraineté. Habib Bourguiba le rejeta ouvertement,
ce qui constitua l'une des premières étincelles de la révolution armée, qui
éclata le 18 janvier 1952, date à laquelle se tint dans la clandestinité, le
Congrès extraordinaire du Parti dont le Résident Général Jean de Hautecloque
avait interdit l'organisation et qui allait réclamer l'indépendance.
Bourguiba fut alors éloigné à Tabarka, puis à La
Galite où il passa deux années en exil, mais conserva le contact avec les
patriotes qu'il appelait à la résistance et à la persévérance dans le combat.
Vers l'indépendance (1954-1956)
Après le rejet des réformes de Pierre Voisard, le 4
mars 1954, il fut transféré à l'île de Groix et dans des endroits proches de
Paris d'où il continua de suivre l'évolution de la cause tunisienne. Arrivé au
pouvoir en France, le 18 juin 1954, Pierre Mendès-France effectua une visite en
Tunisie et prononça son fameux discours du 31 juillet 1954 dans lequel il
annonça que son Gouvernement reconnaissait l'autonomie interne de la Tunisie.
Un Gouvernement intérimaire fut alors constitué en vue des pourparlers, avec la
participation de trois membres du Parti du Néo-Destour; et il fut procédé à la
signature du Traité de l'autonomie interne, le 3 juin 1955.
Un différend majeur éclata alors, entre le Leader
Habib Bourguiba et le Secrétaire général du Néo-Destour, le Leader Salah Ben
Youssef pour qui les accords de l'autonomie interne constituaient un pas en
arrière. Le différend s'aggrava au point de provoquer une scission dans les
rangs des militants et de fissurer l'unité nationale. Le différend allait être
tranché au profit de Bourguiba, lors du congrès que le Néo-Destour tint à Sfax
le 15 octobre 1955. Quelques mois plus tard, le cours de l'histoire allait
aider les Tunisiens à réclamer l'indépendance totale. Le Gouvernement tunisien
engagea, en effet, des pourparlers qui s'achevèrent par la signature du
Protocole du 20 mars 1956.
La constitution d'un état moderne (1956-1971)
Le 8 avril 1956, il fut procédé à l'élection de
l'Assemblée Nationale Constituante dont le Leader Habib Bourguiba fut le
premier président. Le 14 avril 1956, il fut chargé de former le premier
gouvernement de la Tunisie indépendante. Le 25 juillet 1957, était proclamé le
régime républicain et Bourguiba devenait Président de la République.
Il entreprit, depuis lors, de débarrasser le pays de
toutes les séquelles de la période coloniale. Les réformes se succédèrent pour
mettre en place un Etat moderne, parachever la souveraineté nationale et
moderniser la société, à travers la propagation de l'enseignement et la
promulgation du Code du statut personnel. Le pays fut divisé en 14 provinces,
appelées Gouvernorats, dotés d'une administration moderne. Le Congrès de
Bizerte instaura la coexistence des trois secteurs (public, privé et
coopératif); mais l'expérience de coopérativisation ayant manqué détruire
l'économie du pays, Bourguiba se résolut à changer d'orientation économique à
partir d'octobre 1969.
Défenseur passionné d'une modernité arabe, l'ancien
président s'est également distingué de ses homologues en politique étrangère.
Vingt ans avant le président égyptien Anouar el-Sadate, il préconise la
normalisation des rapports avec Israël en proposant la création d'une
fédération entre les Etats arabes et l'Etat hébreu, une suggestion qui lui
attirera les foudres des nationalistes de la région. Sous la pression de ses
partenaires, Habib Bourguiba condamne à son tour les accords de paix de camp
David en 1978, ce qui, en contrepartie, vaudra à la Tunisie d'accueillir le
siège de la Ligue arabe, puis celui de l'Organisation de libération de la
Palestine (OLP).
Enfin, bien que l'Islam reste la religion d'état, le
pouvoir des chefs religieux fut grandemant réduit. Les femmes accèdent à un
statut inouï dans le monde arabe, dépassant même celui des Françaises dans
certains domaines. La polygamie est interdite, le divorce autorisé et
l'avortement légalisé.
Habib Bourguiba divorce de Mathilde puis épouse
Wassila à qui il remettra de plus en plus de pouvoir, l'âge venant.
Les faux pas de Bourguiba (1971-1987)
Le 11 octobre 1971, les assises du congrès du Parti
Socialiste Destourien tenues à Monastir adoptèrent une orientation qui n'eut
pas l'heur de lui plaire. Alors, un deuxième congrès, convoqué, toujours à
Monastir, le 12 septembre 1974, décida d'amender la Constitution de façon à
instituer la présidence à vie au bénéfice du Leader Habib Bourguiba.
Quoiqu'elle eût à connaître durant les années 70 une
période de relance économique, grâce à l'adoption d'une politique de
libéralisation de l'économie mise en place par feu Hédi Nouira, la Tunisie ne
fut pas à l'abri des convulsions politiques, sociales ou économiques, qui
allaient s'amplifier, tout particulièrement au milieu des années 80. Le clientélisme
(ou "pistonnage") prit de plus en plus d'ampleur jusqu'à étouffer le
développement économique social du pays. La situation devint d'autant plus
complexe que l'âge avancé du Leader Habib Bourguiba, l'aggravation de son état
de santé et son incapacité de gérer les affaires de l'Etat, attisaient les
convoitises de tous ceux qui, autour de lui, s'entre-déchiraient pour la
succession.
Le pays s'engagea ainsi dans une crise politique et
sociale étouffante, rendue encore plus grave par la dégradation de la situation
économique qui était perceptible à travers la paralysie des rouages de l'Etat
et l'obscurcissement des horizons devant les Tunisiens et les Tunisiennes,
aiguisant leur sentiment d'inquiétude, de désespoir et de perte de confiance en
le présent comme en l'avenir. Cette situation favorisa la montée de
l'Islamisme, ce qui mena le pays au bord de la guerre civile, avec des émeutes
de plus en plus vives.
Commencé dans une atmopshère de libéralisme et de
laïcisation de la société tunisienne, le long règne de Bourguiba s'achève dans
une atmosphère de crépuscule alimentée par une une grave crise économique et
une véritable paranoïa du chef de l'Etat, engagé dans une lutte sans merci
contre la montée de l'islamisme menée par le général Ben Ali.
La destitution du 7 novembre 1987
Devant les dangers qui guettaient le pays et les
menaces qui pesaient sur sa sécurité et sa stabilité, Zine El Abidine Ben Ali,
nommé Premier Ministre, le 2 octobre 1987, se résout à intervenir, le 7 novembre
de la même année. Certificats médicaux à l'appui, il destitua le Président
Bourguiba, jugé sénile, et prit en main les destinées du pays à l'issue d'un
«coup d'Etat médical», unique dans les annales du monde arabe.
Dans sa Déclaration du 7 novembre, le Président Ben
Ali a rendu hommage aux énormes sacrifices consentis par le Leader Habib
Bourguiba, premier Président de la République Tunisienne, en compagnie d'hommes
valeureux, au service de la libération de la Tunisie et de son développement.
Maladie et disparition du Leader
Le Président Ben Ali a entouré le Leader Habib
Bourguiba de ses attentions et de sa sollicitude, en hommage à la place qu'il
occupe dans l'histoire du pays et aux services louables qu'il a rendus à la
patrie. Le Leader Habib Bourguiba fut assigné à résidence à Monastir, sa ville
natale, où il s'était fait construire un imposant mausolée de marbre blanc,
dans une résidence confortable et où il bénéficia d'une sollicitude constante
de la part d'une équipe médicale et d'un personnel attentif à tous ses besoins.
Habib Bourguiba se disait lui-même «bien traité» par le nouveau pouvoir.
Souffrant de troubles de l'élocution et de l'attention depuis plusieurs années,
le «combattant suprême» recevait parfois quelques visiteurs étrangers, mais
aussi l'actuel chef de l'Etat, qui aimait néanmoins s'afficher aux côtés de
celui qui restera dans l'histoire comme le véritable fondateur de la Tunisie
moderne. De son côté, le Leader Habib Bourguiba rendit visite au Président Ben
Ali, au Palais de Carthage, le 13 mai 1990.
Le 5 mars 2000, Bourguiba est hospitalisé en urgence,
mais retourne chez lui 8 jours plus tard, où il mourra le 6 avril 2000 à l'âge
de 97 ans environ.
Avec la disparition du Leader Habib Bourguiba, la
Tunisie et le monde perdent l'un des chefs historiques qui ont conduit leurs
pays à l'indépendance et à la liberté, et l'un des plus grands hommes que le
vingtième siècle ait connus au Maghreb, dans le monde arabe, en Afrique et dans
le Tiers-monde.
Mausolée Habib Bourguiba
Monastir abrite un très grand cimetière peuplé d'une centaine de tombes d'une grande
sobriété, qui remontent parfois au 12e siècle. Vous y remarquerez ci et là, des
marabouts à dôme blanc. Au bout de ce cimetière se dresse le mausolée de Habib Bourguiba.
Bourguiba est né en 1903 à Monastir et fut président de la Tunisie indépendante. La construction de l'impressionnant caveau de famille débuta en 1963. L'imposant mausolée renferme les défunts de la famille Bourguiba. Habib Bourguiba, qui décéda en 2000, repose dans une tombe en marbre au milieu du grand mausolée, sous la coupole dorée. Une vaste route mène à ce majestueux complexe flanqué de deux hauts minarets. Lorsque le soleil brille, la coupole dorée laisse entrevoir de magnifiques scènes.
Cimetière
Monastir
abrite un très grand cimetière peuplé d'une centaine de tombes d'une grande
sobriété, qui remontent parfois au 12e siècle.
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